J205
7h du mat, pas 2 secondes que le bus pour la Chapada Diamantina a démarré que je me fais scotcher par un énorme bonhomme qui s'empiffre de gâteaux et de sodas, postillonnant son inintéressante conversation sur ma nausée -propre et figurée-. Quand je rabas mon duvet sur ma tête il change de banquette... Et je m'endors avec cette copine appelée cocculine. Dehors, les cactus se multiplient à mesure que les villages et les routes se raréfient, et enfin apparaît Lençois, ville coloniale aux murs colorés plantée aux milieu des collines.
Poser le sac, rencontrer Salomé et Marcos les argentins, faire connaissance avec Luisa, la jolie poupée italienne... Et partir au Ribeirao do Meio où Marcos use le fond de son short sur le toboggan naturel tandis que les filles trempent leurs pieds dans ce qu'on dirait de la guiness. Paix et plaisir des retrouvailles avec Mae Natureza. Le soir une bizarre prof de yoga nous invite à une fête nulle, Luisa et moi rentrons.
J206
"Ordem et progresso" en travers sur le derrière, Mikaela assure le divertissement tandis que nous arpentons les boutique "hippies" de la rue commerçante. Puis notre petit groupe se dirige vers le Caminho do Serrano. Les gamins du coin se jettent sans peur dans les puits à l'eau sombre, un vieux fait la sieste sous un rocher, des femmes frottent du linge contre la pierre en aval... Et nous barbotons dans ces piscines naturelles et surréalistes. Au Poço Halley, chacun médite dans son coin, en paix entre minéral et végétal. La pluie nous chasse vers une drôle de soirée de danses traditionnelles : tarentelle italienne, chacarera argentine, folklore roumain... Je voudrais danser le fandango... Mais je ne sais pas, alors c'est salsa, lambada, danse orientale... Nous suons, rions, jouons, puis dans nos lits tombons.
J207
Luisa et Mikaela sont parties. Je pars en balade avec ceux qui restent et Wendel, notre guide un peu fou. La pluie guette, nous pressons le pas jusqu'à la Gruta do Lapão. Mal équipés en lampes torches, nous avançons lentement dans le noir. Quelquepart sous nos pieds les 40 corps de garimperos (chercheurs de diamant) ensevelis après un accident et jamais retrouvés. Ça vous inspire un film d'horreur de station service? Moi aussi. De rocher en rocher, dessus, dessous et parfois en se contorsionnant, nous traversons un bout de montagne. Le trou de lumière de la sortie fait mal aux yeux, le soleil accompagne notre retour.
Plus tard le regard triste de l'épouse du pizzaiolo et l'agréable conversation de Graham.
J208
Les copains ont glissé des mots sous la porte avant de partir. Alors c'est ça le voyage? S'attacher à des personnes en quelques minutes et les voir disparaitre aussi vite... Mon cœur est comme le sac de Mary Poppins : sans fond!
Je monte dans la voiture de Juliano avec Virginia et Daniel : 2h de paysages verts secs et déserts, et bientôt une piste rouge d'où s'envolent des vautours dérangés pendant la dégustation d'un serpent. Nous descendons au Poço Encantado, il faut baisser la tête dans l'entrée éclairée à lampe à gaz, et sans plus d'efforts la magie s'offre à nous : un immense puits à la transparence extraordinaire dévoile ses fonds comme s'ils étaient a portée d'orteils. Jusqu'à 60m de profondeur un rayon bleu apparaît en même temps que le soleil daigne s'immiscer par l'ouverture de la grotte. Les fées vivent ici... Nous les laissons et reprenons la route jusqu'au Poço Azul. Douche pour se débarrasser des produits qui pourraient contaminer l'eau, gilet de sauvetage pour se laisser flotter et limiter l'érosion accélérée par les mouvements brusques. Cette grotte est aussi incroyable que la 1ere, le bleu foncé de l'eau percé de rayons blancs... Je respire fort avec mon tuba, impressionnée. Je regarde aussi loin que possible sous mes pieds, mais savoir que le fond là, est à plus de 60m, me donne le vertige. Je m'accroche à un rocher où de mini crevettes translucides évoluent. Je soigne mes peurs d'enfant et converse avec les esprits du mammouth et des tigres a dents de sabre dont on a retrouvé les fossiles plus loin, là où il fait noir sous moi. Avant de repartir, nous contemplons la Chapada dans un silence religieux.
La nuit venue nous allons rendre visite à une sorcière aux gâteaux hyperglycémiques servis en patchwork de napperons, pierres précieuses et bougies.
J209
Je sens le vent et la pluie sur mon visage, dans mes paumes offertes au paysage. Les roches rivalisent d'originalité en formes et couleurs, la végétation se fait modeste, la brume et les flaques appellent mes fantaisies mentales... Celtiques en l'occurrence. Un rocher surplombe le vide, à plat ventre au dessus de 400m j'admire la vue et l'eau de la cascade qui n'a pas touché le sol qu'elle remonte pour nous arroser.
Nous quittons la Fumaça, traversons Palmeiras, bizarre... (consanguin c'est péjoratif?) et allons nous évanouir un peu avant le bus de nuit.
J210
Me revoilà donc a Salvador, à galérer avec mon sac dans un bus plein où le chauffeur ne comprend rien et refuse de me laisser descendre où ça me chante. Cette idée que le gringo est un imbécile fraichement débarqué m'agace de si bon matin. On n'est jamais aussi bien porté que par soi même : à pieds! Zombie part se recoucher.